Démarrage de la campagne océanographique FIBROSAINTES au sud de Terre-de-Bas, Les Saintes, Guadeloupe

Les équipes du projet PREST (piloté par l’OVSM-IPGP) ont démarré le mardi 1er juin 2021 l’implantation d’un observatoire sous-marin, doté de capteurs, sismique, inclinométrique et pressiométrique innovants à mesures optiques, pour améliorer la surveillance de la zone de sismicité des Saintes. C’est une équipe de Géoazur, spécialiste de ce type d’opération qui dirigera la campagne océanographique FIBROSAINTES en charge du déploiement de ce nouveau dispositif de surveillance.

La majorité des sources sismiques importantes (et donc aussi des tsunamis) menaçant les îles de la Caraïbe est située en mer. Aussi, il est indispensable de développer des techniques permettant l’installation de réseaux de capteurs géophysiques sous-marins afin d’étudier ces aléas au plus près (séismes, volcans, glissements de terrains, tsunamis…).

Dans le cadre du projet PREST (Interreg V Caraïbe) piloté par l’Observatoire volcanologique et sismologique de Martinique de l’Institut de physique du globe de Paris (OVSM-IPGP), une campagne océanographique exceptionnelle a démarré le mardi 1er juin 2021. C’est l’aboutissement de plusieurs années de recherche et développement sur les capteurs optiques en bout de fibre, réalisés par l’IPGP, l’ESEO et l’ENS, en vue de surveiller au plus près la sismicité de la zone des Saintes, touchée par le séisme de 2004, et toujours affectée par des tremblements de terre.

Conçue et développée sous la direction de Pascal BERNARD, physicien à l’IPGP et responsable de cet axe dans PREST (WP7) et Guy PLANTIER, directeur de la recherche de l’ESEO et membre de l’Université du Mans, cette instrumentation innovante permet de s’affranchir de nombreux problèmes liés au déploiement habituel d’électronique et d’énergie en fond de mer (comme les sismomètres sous-marins classiques appelés OBS). Ici, un sismomètre, un inclinomètre et un pressiomètre purement mécaniques, posés à 40m de profondeur sous l’eau et situé à 4-5 km au sud des Saintes sont reliés par un câble optique à Terre-de-Bas (office du tourisme) où un interrogateur laser permet à distance de mesurer ses mouvements avec une grande précision. Le prototype de sismomètre a été testé et validé en 2019-2020 au large de Brest et c’est la première fois qu’il va être installé dans des conditions réelles de surveillance puisque les données seront transmises en temps réel aux observatoires volcanologiques et sismologiques de Guadeloupe et de Martinique (OVSG-OVSM-IPGP).

En outre, la fibre elle-même, permettra de suivre la propagation des ondes sismiques en tout point de son parcours, grâce à un autre interrogateur optique placé à terre par l’équipe de Géoazur. Cette approche novatrice est rendue possible par le suivi des perturbations du signal lumineux liées au passage des ondes sismiques. Ainsi, avec un point de mesure tous les 10 mètres sur la longueur du câble, la fibre optique représentera l’équivalent de 500 sismomètres. L’interrogateur est un développement de la PME Febus Optics.

Déroulé de la campagne océanographique :

La campagne océanographique FIBROSAINTES est dirigée par Yann HELLO, ingénieur de recherche IRD à Géoazur (Université Côte d’Azur). Le déploiement de cet observatoire sous-marin de surveillance sismique est réalisé à l’aide du navire de la flotte océanographique française ANTEA (propriété de l’IRD), opéré par l’IFREMER. La campagne durera jusqu’au 21 juin 2021.

Figure 1 : L’ANTEA navire de l’IFREMER arrivant aux Saintes

Pendant les 2 premiers jours, des ingénieurs de l’Antea assistés de plongeurs vont réaliser des images des fonds marins à l’aide d’un sondeur latéral (figure 2), d’un véhicule sous-marin téléguidé et pour préparer et déterminer le futur trajet du câble optique et la zone d’implantation de l’observatoire sous-marin. Cette zone d’implantation devra se situer au niveau des zones de sable en bordure sud du platier corallien, dans des zones de rhodolithes désagrégées (débris de coraux morts), et devra éviter le corail massif.

Figure 2 : Sondeur latéral pour imager le fond de la mer

Figure 3 : Cartes d’implantation de l’observatoire sous-marin des Saintes.

Le câble principal (entre les points A et B, Figure 3) est enfoui dans les sédiments, grâce à une technique conçue et développée par Anthony SLADEN (CNRS) au sein du laboratoire Géoazur : le déroulement du câble est réalisé au moyen d’une charrue en fond de mer, tractée par l’Antea portant le câble sur un touret et l’ensouillant au fur et à mesure de son avancée.

À chacun des points A et B (Figure 3), des corps morts sont immergés pour y installer des boîtes de jonction de la fibre. Les instruments sont installés au point B et connectés à la fibre par une soudure optique réalisée sur le navire.

Un des problèmes majeurs est de protéger le câble dans la zone côtière où la houle, les vagues, les tempêtes et l’activité maritime (mouillage, pêche) risquent de l’endommager. Dans cette zone de 300 mètres dite zone d’atterrage, située entre le point A (Figure 3) et la station de mesure à l’office du tourisme de Terre-de-Bas, des demi-coquilles de fonte fabriquée par la société innovante FMGC sont installées par la société guadeloupéenne AMAYA dirigée par John PERRET. C’est un serpent de métal de 300 mètres de longueur et 8 tonnes de fonte installés par des plongeurs de la société qui protégera le câble jusqu’à la côte.

En plus de l’équipage, sont présents sur le navire ANTEA : Yann HELLO (Géoazur, chef de mission), Pascal BERNARD (sismologue IPGP et PREST), Sébastien BONNIEUX (chercheur  Géoazur) avec les plongeurs scientifiques Guillaume de LIÈGE (IMEV, Villefranche/mer), Mathieu CAMUSAT (Station biologique de Roscoff), Jean-Claude ROCA (Station océanographique de Banyuls) et deux plongeurs professionnels de TSMA (Villefranche/mer), tous habitués de ce type d’opération. Les premiers jours, deux ingénieurs opèrent le sonar latéral pour imager le fond de la mer.

Depuis l’office du tourisme de Terre-de-Bas des chercheurs et ingénieurs installent le système d’acquisition optique de la station de mesures et testent la fibre tout au long de l’opération de déploiement des instruments en mer : Alexandre NERCESSIAN (sismologue IPGP), Philippe MÉNARD et Guillaume SAVATON (développeurs du sismomètre et  de l’interrogateur optique), tous deux ingénieurs à l’ESEO, et Frederick BOUDIN (ingénieur à l’ENS).

À l’observatoire de Guadeloupe, Sébastien DEROUSSI (Resp. Technique de l’OVSG-IPGP) assure la coordination des opérations des différents partenaires.  

Le câble comporte 12 fibres optiques monomodes pour mesurer plusieurs instruments. Une fois en place, l’observatoire sous-marin comportera le sismomètre (4 voies), un inclinomètre longue base (2 voies) et un pressiomètre (2 voies), tous deux développés par Frederick BOUDIN (ENS), et enfin un hydrophone pour l’écoute des mammifères marins.

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